Remise à l’eau des poissons

La remise à l’eau des poissons : Devenez un PRO

Depuis plusieurs années, de plus en plus de pêcheurs sportifs effectuent la remise à l’eau de leur capture. Seulement, l’efficacité de cette pratique repose sur la présomption que le poisson gracié va survivre pour grandir et se reproduire. En effet, certaines techniques ou engins permis peuvent avoir un impact important sur la survie des poissons relâchés. Mais lesquels sont à prioriser afin de maximiser le taux de survie lors de la remise à l’eau ? Cliquez sur les images pour voir les vidéos, les dépliants et l’affiche.

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La remise à l’eau vise :

  • Une amélioration de l’état de santé des populations de poissons ;
  • Une augmentation du nombre de géniteurs dans les cours d’eau ;
  • Une pérennisation de la pêche pour les générations futures.

Deux raisons peuvent inciter les pêcheurs à la pratiquer :

  • La volonté du pêcheur par soucis de conservation de la ressource ;
  • La réglementation en place.

En plus d’aider les pêcheurs à pratiquer une pêche sportive contribuant à préserver la ressource et la qualité des écosystèmes et des espèces, le partage de nouvelles techniques encourage la pratique des activités et offre une plus grande diversité à la clientèle.

Suivant vos pratiques, d’autres techniques et outils peuvent vous être utiles afin d’augmenter les chances de survie des poissons graciés.

 

 

1. Favorisez les leurres artificiels plutôt que les appâts naturels

Les appâts naturels tels que les poissons, les sangsues ou les vers sont plus susceptibles d’être avalés profondément que les leurres artificiels. Par conséquent, l’hameçonnage peut provoquer des blessures sévères à l’estomac, l’œsophage ou les branchies, entrainant une plus forte mortalité des poissons relâchés. D’après plusieurs études, les leurres artificiels permettraient d’avoir 10 fois moins de mortalité que les appâts naturels; il est donc recommandé de favoriser les leurres artificiels lors des sorties de pêche.

 

Pourquoi les utiliser :

  • Avalés moins profondément ;
  • Diminution du temps de manipulation ;
  • Diminution du temps d’exposition à l’air.

À prendre en compte :

Les leurres artificiels olfactifs sont aussi à éviter, car ils ont les mêmes conséquences que les appâts naturels.

 

 

2. Remplacez les hameçons de type J ou les trépieds par des hameçons circulaires

Les hameçons circulaires sont caractérisés par une pointe à 90° par rapport à l’axe de la tige, contrairement aux hameçons traditionnels dits de type J qui ont leur pointe parallèle à cet axe. La configuration des hameçons circulaires permet d’éviter 90% du temps des hameçonnages profonds, comme dans l’estomac, l’œsophage ou les branchies. En effet, même s’il est avalé profondément par le poisson, lorsque le pêcheur remonte sa ligne, au lieu d’accrocher les parties vitales, l’hameçon va sortir et venir agripper le bord de la bouche du poisson.

L’hameçon circulaire peut être utilisé avec des appâts naturels, mais il est préférable de le combiner avec des leurres artificiels tels des cuillères ou des poissons-nageurs. Cela permet d’obtenir un meilleur taux de survie des poissons graciés. Cependant, il est important de bien équilibrer le leurre pour ne pas changer son action. En effet, les hameçons circulaires doivent être plus gros que les trépieds afin d’avoir le même succès de pêche.

 

Il existe deux types d’hameçons circulaires : les inclinés (« offset ») et les droits (« non-offset »). Il est préférable d’utiliser des droits pour avoir une efficacité maximale de l’hameçon sur la survie du poisson.

Pourquoi les utiliser :

  • Moins de ferrages profonds, 90% des hameçonnages se font sur le bord de la bouche ;
  • Diminution des blessures ;
  • Fonctionne pour tous les types de poissons, il faut seulement adapter la taille de l’hameçon à l’espèce visée. Attention, il ne faut pas prendre la même taille pour des hameçons circulaires que pour des trépieds.

Les faits :

  • Pas plus chers que les hameçons en J traditionnels ;
  • Aussi efficaces ;
  • Disponibles dans toutes les tailles.

Attention :

Ne ferrez pas le poisson lorsque vous utilisez l’hameçon circulaire ! En ferrant, l’hameçon pourrait sortir trop rapidement et ne pas agripper la prise. Gardez plutôt une tension constante dans la ligne en moulinant régulièrement.

Pourcentage de mortalité des poissons pêchés avec des hameçons traditionnels (J hooks) comparé à ceux pêchés avec des hameçons circulaires (circle hooks) dans les mêmes conditions. La ligne passant par l’origine (pente = 1.0) montre les valeurs attendues si les deux hameçons avaient le même taux de mortalité. Les hameçons circulaires ont significativement moins de mortalité que les hameçons traditionnels (p<0.005, t-test). Les trois points regroupés représentent trois types d’hameçon circulaire comparés à un seul hameçon traditionnel (Bartholomew et Bohnsack, 2005).

 

 

3. Coupez la ligne si le ferrage est trop profond ou entrainerait des blessures sévères

Mise en situation : vous venez de capturer un poisson que vous devez ou désirez remettre à l’eau, vous avez 15 secondes pour prendre la bonne décision.

Posez-vous ces questions :

  • Est-ce que l’hameçon est pris dans l’estomac, l’œsophage ou les branchies ?
  • Est-ce que je risque de blesser sévèrement le poisson si je retire l’hameçon ?

Si vous répondez OUI à l’une ou l’autre des ces questions, coupez la ligne !

Pourquoi le faire :

  • Diminue les blessures et les saignements ;
  • Augmente significativement les chances de survie ;
  • Ne nuit pas à l’alimentation du poisson ;
  • Excrétion de l’hameçon dans la majorité des cas ;
  • Dissolution naturelle de l’hameçon.

 

 

4. Choisissez une épuisette avec des mailles sans nœuds ou en caoutchouc

Suivant l’espèce visée, l’épuisette peut être requise. Cependant, le type de filet utilisé peut entrainer des blessures aux nageoires et aux écailles des poissons ou encore leur faire perdre leur couche de mucus, ce qui les rend plus vulnérables aux maladies. Il est donc recommandé :

  • De limiter l’utilisation des épuisettes ;
  • D’en choisir une sans nœuds ou en caoutchouc, lorsque l’épuisette est nécessaire ;
  • D’utiliser une civière pour les gros poissons, tels les maskinongés.

 

 

5. Ajustez votre prise sur le poisson

Si vous choisissez de remettre le poisson à l’eau, il est préférable d’éviter de toucher le poisson ou au moins de limiter le temps de manipulation.

Si vous avez besoin de toucher le poisson, voici quelques règles à respecter :

  • Toujours avoir les mains mouillées ou avoir des gants en coton humidifié pour éviter d’enlever la couche protectrice de mucus des poissons ;
  • Garder le plus possible le poisson dans l’eau ;
  • Ne pas toucher aux branchies et aux yeux du poisson, car ce sont des organes vitaux. Les branchies jouent le rôle des poumons pour les poissons et la moindre blessure pour avoir des conséquences mortelles. La vision est un sens très important pour beaucoup de poisson. En le prenant par les yeux, comme souvent il est commun de faire avec le brochet, le poisson ne pourra plus s’orienter, se nourrir ou se défendre contre les prédateurs. Ses chances de survie seront donc grandement diminuées ;
  • Ne pas tenir les gros poissons par la mâchoire, car ça pourrait endommager les vertèbres ou la gueule ;
  • Les tenir plutôt à l’horizontale en soutenant le ventre pour éviter les dommages aux organes internes ;
  • Si vous utilisez des gants en latex, qui préservent les poissons des maladies que vous pouvez leurs transmettre, il est important de les mouiller avant de toucher les individus.

Photo : Martin Vaillant, pêcheur professionnel

 

6. Limitez le temps hors de l’eau

La durée de l’exposition à l’air a un impact important sur la survie du poisson. Il est donc important de minimiser le temps passé hors de l’eau pour une meilleure survie des poissons relâchés.

Quelques statistiques :

  • Taux de survie des truites arc-en-ciel poursuivies pendant 10 minutes en fonction du taux d’exposition à l’air (Ferguson et Tufts, 1992)
  • Un crapet poursuivi pendant 30 secondes, puis exposé à l’air pendant 30 secondes a besoin de deux heures pour récupérer complètement. S’il est exposé à l’air pendant 180 secondes, il a besoin de quatre heures pour récupérer (Cooke et coll., 2001).

Pourquoi le faire :

  • Diminution du temps de récupération ;
  • Diminution du stress.

Comment faire :

  • Avoir tout le matériel à porter de mains : pinces de décrochage, appareil photo, ruban à mesurer, etc. ;
  • Enlever l’hameçon en gardant le poisson dans l’eau ;
  • Faire le plus de manipulation avec le poisson dans l’eau : prise de photo, mesurage, etc.

 

 

7. Favorisez une pêche active plutôt qu’une pêche passive

Les pêches passives (ligne morte) augmentent les chances que le poisson avale profondément l’hameçon, les chances de blessures sévères sont donc accentuées. De plus, lorsqu’un poisson est pris par un hameçon, il va se débattre, le temps de combat du poisson est prolongé et pourrait le conduire à l’épuisement. Les pêches actives permettent aux pêcheurs d’être plus réactifs et donc de limiter le temps de combat et les blessures causées par les hameçons.

 

 

8. Limitez la durée du combat en adaptant votre matériel à l’espèce ciblée

Lorsque le poisson est ferré par l’hameçon, il va se débattre. Cette activité musculaire est très intense pour ce dernier et entraine des impacts importants sur ses réponses physiologiques. En effet, lors d’un combat, le transfert des gaz tels que le CO2 et l’O2 est presque arrêté, ce qui entraine une diminution de l’efficacité du muscle cardiaque et une augmentation du rythme cardiaque.

Quelques statistiques :

  • Les maskinongés ont besoin de 12 à 18h pour se remettre de l’augmentation d’acide dans leurs muscles suite au combat (Beggs et coll., 1980).
  • Les taux de chlorure dans le sang et les changements dans le plasma des truites arc-en-ciel reviennent à la normal au bout de 8h (Wydoski et coll., 1976).
  • L’achigan à grande bouche a besoin de plus de 2h pour retrouver ses variables cardiaques après un combat (Cooke et coll., 2003).

Afin de limiter la durée du combat, il est important de pouvoir récupérer le poisson le plus rapidement. Pour ce faire, il faut avoir les équipements adaptés à l’espèce ciblée :

  • Résistance du fils ;
  • Résistance de la canne à pêche et du moulinet ;
  • Outils de décrochage à portée de mains.

Pourquoi le faire :

  • Diminue l’épuisement du poisson, donc augmente ses chances de survie suite à la remise à l’eau ;
  • Réduit le nombre de poissons ferrés perdus à cause d’une ligne cassée.

Photo : Martin Vaillant, pêcheur professionnel

 

 

9. Prenez en compte la profondeur avant de choisir de remettre à l’eau un poisson

Suivant l’espèce de poisson pêché, la profondeur de la capture est importante à prendre en compte. En effet, deux réactions peuvent être observées suite à une remontée rapide des poissons pêchés en profondeur :

  • Les poissons sont incapables de réagir rapidement à un changement de pression, car ils n’ont pas de liaison entre la vessie gazeuse et le canal alimentaire, donc ils recrachent leur œsophage ou/et leur vessie natatoire par la bouche (barotraumatisme). Ce sont les poissons physoclistes qui regroupent les dorés, les perchaudes et les bars.
  • Les poissons sont en mesure de s’ajuster rapidement, car ils ont un canal pneumatique qui relie l’œsophage et la vessie natatoire. Ce sont les poissons physostomes qui regroupent les cyprins, les truites, les ombles et les saumons.

Il est donc important de prendre en compte la profondeur de la prise et d’éviter de pêcher en profondeur si vous voulez remettre à l’eau votre prise, surtout pour les espèces physoclistes

Figure : Jill St John. 2003. Votre poisson a-t-il été victime de la “maladie des caissons”, et survivra-t-il ?. Ressources marines et commercialisation – Bulletin de la CPS n° 11 

 

 

10. Préférez les hameçons en alliage de carbone plutôt qu’en acier inoxydable

Lorsque l’hameçon est trop profondément engagé, il est préférable de couper la ligne (voir point 3). L’hameçon reste donc dans le poisson remis à l’eau. Suivant plusieurs études, une part importante des poissons graciés en laissant l’hameçon réussissent à expulser ce dernier rapidement. Néanmoins, pour faciliter l’excrétion, il est préférable d’utiliser des hameçons en alliage de carbone qui pourront se dégrader avec le temps plutôt que des hameçons en acier inoxydable.

 

 

11. Évitez les températures de l’eau et de l’air extrêmes

La température de l’eau a une influence directe sur la survie des poissons remis à l’eau. En effet, lorsque la température de l’eau est très chaude, la concentration en oxygène dans l’eau disponible diminue tandis que la prolifération des bactéries et des maladies est accentuée. Les poissons graciés, qui subissent déjà un stress et de l’épuisement suite au combat et à la manipulation, ont donc plus de difficulté à aller chercher l’oxygène dont ils ont besoin et leurs blessures sont plus susceptibles de s’infecter. De plus, les poissons présentant des saignements suite à la capture ont beaucoup plus de chance de mourir si l’eau est trop chaude.

La température de l’air a aussi une influence sur la survie des poissons, surtout en période hivernale. En effet, les poissons sortis sur la glace sont susceptibles d’avoir les branchies et les yeux endommagés par le gel.

C’est pourquoi, lorsque vous voulez remettre à l’eau les poissons pêchés, il est préférable d’éviter les températures de l’eau trop chaudes (>21°C) et de l’air extrêmement froides, afin que leur chance de survie soit optimale.

 

 

12. Préférez les hameçons sans ardillon pour un décrochage plus facile

Les hameçons circulaires et traditionnels peuvent être sans ardillon. En effet, il suffit de prendre une pince et d’écraser l’ardillon, cela ne nuit pas à la solidité de l’hameçon. Cependant, il est préférable d’utiliser des hameçons circulaires avec ardillon que des hameçons traditionnels sans ardillon. L’impact de l’ardillon n’est pas déterminant pour la survie du poisson.

 

Pourquoi l’utiliser :

  • Diminution des blessures et des dommages aux tissus ;
  • Diminution du temps de manipulation ;
  • Diminution du temps d’exposition à l’air ;
  • Augmentation du défi sportif, car cet hameçon demande une technique plus rigoureuse ; cela laisse une chance au poisson.

Photo : NOAA Fisheries

 

 

Avant de relâcher un poisson, il faut se poser les bonnes questions

  • Où l’hameçon a-t-il agrippé le poisson ?
  • Quelle est la quantité de sang perdu par le poisson ?
  • A-t-il des blessures pouvant entrainer sa mort ?
  • Quelle est la profondeur de la capture ? Est-ce que le poisson risque de souffrir de barotraumatisme ?
  • Quelle est la température de l’eau et de l’air ?

En se posant ces questions, le pêcheur est capable d’évaluer les chances de survie du poisson. S’il voit que le poisson a plus de chance de mourir, il est préférable de le garder plutôt que de le relâcher. Cependant, si d’après la réglementation en place, le pêcheur à l’obligation de remettre à l’eau, même si les chances de survie sont faibles, il doit retourner à l’eau le poisson, même mort.

 

 

Les principales causes de mortalité des poissons remis à l’eau

En ordre d’importance, les hameçonnages profonds, les saignements abondants, le temps d’exposition à l’air, l’épuisement et le barotraumatisme sont les facteurs qui influencent le plus négativement les chances de survie des poissons graciés. Les appâts naturels, la forme et la taille des hameçons, le type de pêche, l’expérience du pêcheur et le type de manipulation sont les outils et les techniques utilisés par les pêcheurs qui ont le plus d’impact sur l’ensemble des facteurs de mortalité.

 

Liens utiles

  • Les saines pratiques de la remise à l’eau du poisson du Ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs du Québec
  • Pêche avec remise à l’eau : Guide des techniques de manipulation appropriée du poisson du Ministère des Ressources Naturelles de l’Ontario: Français – Anglais
  • Saison de pêche 2020-21 : dates, limites de prise et tailles permises ici.

 

Liste des partenaires

Ce projet a bénéficié d’un soutien financier du ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs (MFFP) dans le cadre du Réinvestissement dans le domaine de la faune et de Gamakatsu.

Avec la collaboration du MFFP, de Pierre Rivard, de Frédéric Patoine (TV Témis) et des pêcheurs suivants : Daniel Nadeau, Jacques Lalonde, Ambroise Lycke, Thibaut Petry, Ophélie Drevet, Félix Goulet et Daniel Robitaille – pêcheurs professionnels.